De nombreuses entreprises font aujourd’hui face à une pénurie de main-d’œuvre et luttent contre ses répercussions. Dans cet entretien personnel, Paul Henschel nous explique où se situent les plus grands défis et comment les entreprises peuvent y faire face. Depuis le 1er octobre 2022, Paul renforce l’équipe Employer Branding de Farner dans sa fonction de Topic Lead et va élargir l’offre de l’agence dans ce domaine.
Paul, on entend beaucoup parler de marque employeur. Pourquoi ce sujet est-il si actuel ?
L’Employer Branding et le développement stratégique de la marque employeur sont aujourd’hui primordiaux. Le sujet n’est pas nouveau en soi. Il gagne néanmoins en importance depuis quelques années. C’est toujours très surprenant pour moi, car le transfert des « rapports de force » entre l’employeur et les employé.e.s, c’est-à-dire entre l’employeur et le marché du travail, ne s’est pas fait du jour au lendemain. Depuis longtemps les entreprises ne choisissent plus leurs employé.e.s : ce sont désormais les candidat.e.s qui sont en position de force et qui décident. Pourtant, de nombreuses entreprises paraissent encore surprises et dépassées.
« Le fait que des entreprises ne puissent accepter certaines commandes faute de capacités, perdant ainsi des parts de marché, des client.e.s et même leurs propres employé.e.s, fait désormais partie du quotidien. »
S’y ajoute le fait que la génération des baby-boomers parte prochainement à la retraite. La pénurie de main-d’œuvre, ainsi que l’inquiétude légitime vis-à-vis de la relève obligent de plus en plus d’entreprises à investir dans des mesures d’Employer Branding et à renforcer leurs liens avec leurs collaborateur.rice.s et les talents à recruter. Il faut prendre en considération les nouvelles exigences telles que l’évolution du monde du travail, la globalisation et la digitalisation, mais aussi la question de genre au sein de notre société. Cette liste pourrait encore être étoffée. Tous ces changements devraient servir de catalyseur pour inciter les entreprises à investir dans l’Employer Branding.
Et que pensez-vous des efforts actuels des entreprises en matière d’Employer Branding ? Quel est votre point de vue sur le sujet en ce qui concerne le marché suisse ?
Malgré les signes évidents de changement, nous n’en sommes encore qu’aux prémices pour ce qui est de la mise en œuvre de l’Employer Branding. La pandémie de coronavirus n’a fait qu’empirer la situation : les entreprises avaient « d’autres choses à faire » et ont préféré faire face à la perte de commandes, aux fermetures, au chômage partiel, aux réductions budgétaires etc. C’est compréhensible, mais cela n’a bien sûr pas été pensé dans une perspective à long terme.
L’objectif de l’Employer Branding est de créer une marque employeur forte ; une tâche qui ne se fait pas du jour au lendemain.
« Le développement d’une marque employeur n’est pas un sprint, mais un marathon. »
Le positionnement de la marque employeur, appelé également EVP (Employer Value Proposition), et l’image souhaitée de la marque employeur, constituent le point de départ de ce marathon. Aujourd’hui, peu d’entreprises possèdent véritablement un positionnement et une image de marque. Avant de franchir la ligne d’arrivée, il faut faire quelques arrêts, effectuer des sprints intermédiaires, traverser des vallées, gravir des sommets, convaincre et rallier. A l’image d’un marathon, l’Employer Branding exige une bonne préparation et un réel dévouement.
Merci pour cette vision « sportive » du sujet. Les débuts sont difficiles, c’est bien connu. Que conseillerais-tu aux entreprises qui souhaitent se mettre à l’Employer Branding ?
Comme je l’ai déjà mentionné, il n’y a pour l’instant que quelques entreprises qui ont compris que le développement d’une marque employeur leur confère un avantage concurrentiel évident et qui la mettent en œuvre de manière stratégique dans une perspective à long terme. Grâce à une marque employeur forte, les entreprises peuvent disposer d’un énorme avantage concurrentiel dans l’indiscutable « guerre des talents ». Les méthodes pratiquées jusqu’à présent dans le recrutement du personnel ne sont plus d’actualité.
« La technique « Post and pray », c’est-à-dire publier une offre d’emploi en espérant que quelqu’un pose sa candidature, ne fonctionne plus depuis longtemps. »
De même, la corbeille de fruits au bureau ne suffit plus à fidéliser les collaborateur.rice.s. Les entreprises doivent développer d’autres idées pour attirer de nouveaux talents, susciter l’intérêt et convaincre en tant qu’employeur. Cette course aux meilleurs talents exige une remise en question : les entreprises doivent développer et entretenir leur marque employeur.
« À l’avenir, la capacité à convaincre les talents en leur proposant une culture d’entreprise adéquate, à les fidéliser et à les faire progresser décidera dans une large mesure du succès ou de l’échec des entreprises. »
Quelles sont les difficultés d’un projet d’Employer Branding ?
Je sais d’expérience que de nombreuses entreprises ont compris le sujet et son importance, mais ne savent pas par où commencer. Souvent, elles disposent de ressources limitées voire inexistantes et manquent de compétences dans ce domaine.
J’entends également souvent dire : « Nous n’avons pas besoin d’une marque supplémentaire, nous en avons déjà une. » Il est vrai que la marque employeur fait partie intégrante de la marque de l’entreprise et qu’elle se base fondamentalement sur ses valeurs et sur son identité, mais une marque d’entreprise forte ne signifie pas nécessairement une marque employeur forte. Pour les entreprises sans marque employeur perceptible, l’attrait en tant qu’employeur est en général associée aux produits ou aux prestations. Cette perception peut être aussi bien positive que négative, mais n’est cependant pas liée à la qualité de l’employeur. Dans ce domaine, une partie externe neutre, à savoir une agence, peut fournir un excellent soutien et indiquer la direction à suivre.
De plus, l’Employer Branding est encore souvent considéré comme une tâche relevant des ressources humaines ou de la communication d’entreprise. La direction a néanmoins également un rôle à jouer pour faire avancer le sujet. Par ailleurs, l’Employer Branding n’est pas un simple projet ayant un début et une fin, mais il doit être ancré dans la stratégie et faire l’objet d’une vision à long terme.
Les défis auxquels les entreprises sont actuellement confrontées sont plus grands que jamais et la complexité ne cesse de croître. L’Employer Branding continue à être perçu comme un outil opérationnel de recrutement qui doit fonctionner le plus rapidement possible et générer des candidatures.
« Des moyens publicitaires basiques et des visuels colorés ne suffisent plus aujourd’hui pour s’imposer sur le marché du recrutement. En effet, si tout le monde tient le même discours et communique les mêmes choses, qui fait finalement la différence ? »
Souvent, la première conclusion revient à faire un peu de recrutement en remplaçant les visuels colorés de la page des postes vacants, en y intégrant de nouvelles vidéos et en embellissant les offres d’emploi. Toutefois, il ne peut s’agir que d’un plan à court terme qui n’aura pas le succès escompté. En outre, il en faut bien plus pour s’identifier avec la marque employeur. L’Employer Branding ne doit donc pas se résumer uniquement à une stratégie de communication ou à une mesure de recrutement.
« Une bonne stratégie d’Employer Branding s’inscrit fortement dans la culture d’entreprise. »
Mais comment les entreprises peuvent-elles se distinguer de la concurrence ?
Pour les entreprises, l’idée est de s’ouvrir vers l’extérieur et de s’afficher activement de manière aussi authentique et transparente que possible. Ici aussi, la règle « internal first » prime : la communication interne doit être renforcée. L’objectif premier est l’identification et l’appartenance affective à la marque employeur. En l’absence de ces éléments, il est difficile de susciter l’intérêt de potentiel.le.s candidat.e.s. Si toutefois l’image d’un employeur à l’externe concorde avec le point de vue interne du personnel, c’est-à-dire qu’elle montre de manière authentique comment se déroule le travail, le personnel sera alors plus enclin à recommander l’entreprise.
Pour convaincre les personnes intéressées de postuler auprès de leur potentiel nouvel employeur, les entreprises doivent au préalable se poser certaines questions qui pourraient intéresser les futur.e.s candidat.e.s, parmi lesquelles :
« Qu’incarnons-nous ? Qu’est-ce qui nous différencie des autres ? Qu’est-ce que de travailler chez nous ? Qu’est-ce qui nous motive ? Quelle direction souhaitons-nous prendre ?»
Les réponses à ces questions constituent le cœur de la stratégie et la base d’un positionnement réussi en tant que marque employeur. La thématique de l’Employer Branding est en constante évolution. Les questions liées au « Purpose » (raison d’être) et à la diversité gagnent en importance. Il en va de même de l’interconnexion et de l’accès aux informations 24h/24, 7j/7. Ces aspects exercent une influence considérable sur nos décisions et auront un impact de plus en plus fort sur le choix de l’employeur. La création d’une marque employeur attrayante à l’identité unique va donc continuer à gagner en importance sur le plan stratégique. Si les entreprises veulent convaincre leurs groupes cibles, elles doivent tout particulièrement faire attention aux deux points suivants : d’une part, le moment où elles décident de se lancer dans l’Employer Branding et, d’autre part, leur volonté à mettre en place un plan.
Quels sont tes objectifs personnels dans tes nouvelles fonctions chez Farner ?
L’Employer Branding, la communication interne et le recrutement sont mes domaines de prédilection depuis plus de dix ans maintenant. Je suis très enthousiaste à l’idée de mettre mon expérience au service des clients de Farner. Je suis passionné par l’idée d’apporter un soutien aux entreprises en matière d’Employer Branding et de construire avec elles une marque employeur forte pour qu’elles puissent s’imposer à long terme sur un marché du travail de plus en plus compétitif. Je suis persuadé qu’ensemble, nous pourrons réaliser de beaux projets dans ce domaine.
Mes cinq conseils pratiques pour un Employer Branding efficace :
- Pour disposer d’une marque employeur forte et différenciée, il faut du temps, une stratégie à long terme et un positionnement clair.
- Il faut rester crédible et ne rien promettre qu’on ne puisse tenir en tant qu’employeur. Rien n’est moins crédible et ne dissuade plus les futurs talents qu’une « culture factice ».
- Être courageux, avec ses travers et ses défauts. Si vous avez le courage d’être tel que vous êtes en tant qu’employeur vous pourrez fidéliser et trouver les collaborateur.rice.s qui correspondent à votre culture d’entreprise.
- Internal On pense trop souvent d’abord à l’externe. Le premier pas vers le changement doit commencer par l’interne et par ses propres collaborateur.rice.s, car il.elle.s sont les portes-paroles vers l’externe et rendent une marque employeur crédible et unique.
- Communiquez dès maintenant avec votre groupe cible . Vous disposez déjà d’une marque employeur, même sans avoir développé de mesures spécifiques à cet égard. En effet, on parle de vous en tant qu’employeur, que vous le souhaitiez ou non. La question est donc de savoir comment on parle de vous. Engagez le dialogue avec vos futur.e.s collaborateur.rice.s en leur présentant les avantages qu’il.elle.s à vous rejoindre.
En savoir plus sur l’Employer Branding :
Employer branding: démarquez-vous par un positionnement efficace sur le marché du travail
Employer branding: les opportunités et les risques du recrutement 4.0
Employer branding: de la pertinence des classements et des évaluations des employeurs
Employer branding: des stratégies pour une «nouvelle normalité»
Avez-vous des questions sur le thème de l’Employer Branding ?
Paul Henschel
Topic Lead Employer Branding
T +41 44 267 20 08
paul.henschel@farner.ch
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